LES PINK-FLOYD AU BAC MUSIQUE

Classé dans : Divers | 0

formphilharmonique_PINKFLOYD__DSC3878recY’en a qui ont de la chance ! L’Education Nationale a choisi cette année d’intégrer dans les oeuvres étudiées par les élèves préparant le Bac filière musique, le phénoménal album “Atom Heart Mother”.

Je n’ai aucun commentaire à ajouter, sinon remercier Didier Varrod d’avoir organisé ce concert, à l’occasion duquel le philharmonique de Radio France a joué l’oeuvre des Floyd au théâtre du Chatelet, après avoir reçu en interviex Ron Geesin, le compostiteur qui avait été chargé à l’époque de transcrire en partition les délires des Pink Floyd, alimentés de visions halucinées, liées aux prises de stupéfiant.

L’émission est stupéfiante en elle même. Je ne peux que conseiller à ceux de ma génération pour qui “Atom Heart Mother” signifie quelque chose, d’écouter jusqu’à la fin les deux clips qui suivent.

Bravo France Inter.

Premier clip : La présentation du concert, avec l’intervention de Ron Geesin. Second clip, l’émission en entier, avec l’interprétation de la face A de Atom Heart Mother par le Philharmonique de Radio France, dirigé par Jacques Justaffré.

———————

 

L’EMISSION SPECIALE

La musique elle est effectivement juste là, c’est une vibration comme le dit Christophe dans notre générique. Et quelle vibration cet après midi sur France Inter où vous allez avoir la chance d’écouter une version inédite du morceau des Pink Floyd “Atom heart Mother”, extrait de l’album du même nom sorti en octobre 1970. Cette nouvelle version a été interprétée par l’orchestre philarmonique de Radio France le 12 janvier dernier au théâtre du châtelet avec la participation exceptionnelle de Ron Geesing co-compositeur de l’œuvre avec les Pink Floyd. Un évènement organisé dans le cadre des programmes pédagogiques de l’éducation nationale. Puisque cette année l’étude de “Atom heart Mother” est au programme  des étudiants qui passe le bac dans la filière musique ainsi d’ailleurs que pour ceux qui sont inscrits dans la filière générale et qui peuvent choisir en option ce sujet. C’est donc cet après midi un numéro de “quand la musique donne” exceptionnel qui pourrait s’intituler “passe ton bac avec les Pink Floyd”. L’occasion pour certains d’aller à la découverte ou la redécouverte de ce morceau emblématique des Pink Floyd. Mais juste avant de retrouver deux lycéens qui ont assisté à ce concert exceptionnel que vous allez écouter cet après midi sur France Inter et qui sont ici en studio avec moi en compagnie deJean Jacques Justaffré, le chef d’orchestre qui a dirigé cette représentation exceptionnelle. Mais avant cela petit retour sur la génèse du groupe Pink Floyd avant 1970.

LE PROGRAMME DU CONCERT

Présenter dans un même programme Varèse et Pink Floyd n’est pas faire œuvre de confrontation mais de dialogue. Un échange de bons procédés harmoniques au pays des précurseurs. “Déserts” et “Atom Heart Mother” vont donc se succéder sur la scène du théâtre du châtelet et ainsi prolonger cette conversation entre ce que l’on dénomme souvent la musique savante avec la musique pop. Varèse a expliqué le choix du titre “désert” comme tel : “Pour moi c’est un mot magique qui suggère des correspondances à l’infini”.  C’est exactement ce que l’on trouve aussi dans cette œuvre singulière des Pink Floyd, première tentative  de créer dans un registre pop et électrifiée une suite en plusieurs mouvements. Aujourd’hui, il convient d’écouter cet album  (le cinquième du groupe) en se souvenant qu’il fut publié en 1970. En cela, il est symbolique d’une nouvelle ère qui s’ouvre. Le rock des pionniers est déjà loin, le blues rock de Janis Joplin s’est malheureusement dilué avec sa disparition. Emmené par la figure emblématique de Syd Barett qui offre aux débuts de Pink Floyd une psychologie à la fois underground et tourmentée, les premiers albums du groupe sonnent le réveil d’une alternance psychédélique radicale. Jusqu’au jour où soudain Pink Floyd quitte le berceau du dit psychédélisme pour se tourner vers un rock progressif. Symphonies  d’harmonies et de  dissonances classiques, le disque s’ouvre sur un premier morceau magistral. Probablement une des plus grandes compositions du groupe : une longue suite orchestrale pour cuivres, violoncelles et chœurs composée et jouée par un groupe de rock.  “Atom Heart Mother” ouvre la Face A de l’album. C’est une suite instrumentale en cinq mouvements. Les cuivres s’accordent entre eux et c’est parti pour une cavalcade héroïque qui entre dans la légende du rock. Le romantisme floydien nait aussi à cet instant dans cet acte fondateur et aime se confronter à cette tentation de la grandiloquence. Celle d’un pompiérisme rock qui se découvre également. Ecoutez la suite de chœurs qui se structurent en montée et c’est tout à coup le Carmina Burana de l’allemand Car Off qui percute le krautrock naissant.  En cela ce disque est profondément illustratif de la vitalité créative du rock européen qui s’affirme alors.  Et c’est précisément dans cet espace en construction que Pink Floyd va chercher la collaboration  de Ron Geesin, musicien avant gardiste et sorcier du son qui fait alors parler les machines. Qui finissent par respirer, soupirer, et jouir. L’apport de ce cinquième homme est crucial. Il offre à Pink Floyd de ne pas céder aux sirènes du lyrisme symphonique et de rester dans un environnement qui nous rapproche précisément du travail de Varèse dans “désert”. Un travail et une réflexion sur la production d’une matière sonore qu’elle soit industrielle ou jouée. Le son ou le bruit de la ville chez Varèse livre son paysage mental. Le rock de Pink Floyd offre ses images en cinémascope. Faut il rappeler qu’avant Pink Floyd il n’existait aucune animation vidéo sur une scène de rock ?  Depuis la publication de cet album de Pink Floyd, de nombreuses analyses sont venues offrir à cette œuvre majeure, une explication scientifique. Nul n’est besoin ici de les reproduire. Elles ont certes contribué à la reconnaissance institutionnelle d’une musique qui, rappelons le, est née d’une rébellion contre l’académisme. Le rock progressif de Pink Floyd  de “Atom Heart Mother” est une contestation de l’ordre musical établi. Il prétend donc avec raison que l’exploration, la recherche électro acoustique, la quête d’une écriture classique n’est plus le privilège du monde de la musique classique ou contemporaine. Casser les formats de l’architecture pop en vogue (couplet/ refrain : couplet/ refrain/ pont/ refrain), contester l’ordre radiophonique d’alors, poser les interrogations métaphysiques sur le futur, imaginer des contemplations musicales qui évoquent la puissance des substances psychotropes, donner à l’album un titre qui s’inspire d’un stimulateur cardiaque nucléaire, photographier une vache pour illustrer la pochette du disque où le nom du groupe n’apparaît même pas… Toutes ces intentions doivent nous rappeler, si besoin, que l’entrée au programme du baccalauréat d’une telle œuvre, ne doit pas en amoindrir sa portée subversive. Au théâtre du châtelet le rock sera expérimental ou ne sera pas.

Suivre Frédéric Poitou:

Frédéric Poitou est né à Rouen, et y a fait des études au Conservatoire en musique-études en section piano. Il s'est ensuite orienté vers des études scientifiques où il a obtenu un diplôme d'ingénieur, puis un doctorat en Chimie. Il est Expert Judiciaire en France, en Belgique et à Luxembourg, et agrée par les Institutions Européennes.