Cette contribution est l’intégral d’un article dont une partie a été publiée sur le site de Golf Planète (cliquer ICI)
Préambule :
ZAN : C’est l’acronyme de « zéro artificialisation nette », l’objectif du plan pour préserver la biodiversité présenté en Juillet 2018 par le gouvernement définit dans le Titre IV du projet de loi Climat et résilience. Cette ambition inquiète le monde du golf qui y voit un risque de frein au développement de l’un des sports les plus pratiqué en France. Mais à bien y regarder, et à condition que les golfs sachent réfléchir à la nécessaire adaptation de leurs conditions d’exploitation et d’entretien des parcours, ce projet de loi pourrait être l’occasion de mettre en évidence l’importance que représentent ces surfaces réservoirs de biodiversité et poumons verts en périphérie de nos agglomérations, les spécificités et l’exemplarité de la filière dans le domaine.
Le calendrier.
La loi Climat et Résilience adoptée en août 2021 impose aux territoires de diviser par deux le rythme d’artificialisation et de consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers d’ici à 2030, afin d’atteindre le fameux « ZAN » (zéro artificialisation nette) d’ici 2050.
Le problème qui alerte la filière golf est la définition dans la loi des des terres considérées comme étant artificialisées, dont les golfs faisaient partie dans la première définition.
L’INSEE nous donne une bonne définition de ce qu‘est l’artificialisation des sols :
Artificialisation : Transformation d’un sol à caractère agricole, naturel ou forestier par des actions d’aménagement, pouvant entraîner son imperméabilisation totale ou partielle. Elle résulte de l’urbanisation et de l’expansion des infrastructures, sous l’influence de la dynamique démographique et du développement économique. Cette définition insisite aussi sur la notion d’imperméabilisation qui « amplifie le ruissellement de l’eau au détriment de son infiltration, et participe ainsi à l’érosion des sols …/… et contribue également à la dégradation de la qualité chimique et écologique des eaux en intensifiant le transfert de sédiments chargés de contaminants des sols vers les cours d’eau (engrais azotés ou phosphatés, hydrocarbures, métaux lourds, produits phytosanitaires) ».
D’où il ressort une dimension importante à prendre en compte par la suite : La pondération du principe d’artificialisation par celui d’imperméabilisation. Et c’est bien sur les types de terrains concernés par le terme « artificialisation « que blesse le bât !
Car dans sa première livrée, le projet considérait avec la définition qu’en fait l’observatoire national de la biodiversité les terrains de golf et les autres terrains sportifs comme étant artificialisés (à l’inverse des surfaces agricoles intensives considérées comme ne l’étant pas !).
Mais les golfs ne sont ils pas surtout (comme les parcs sont considérés l’être) des vecteurs d’artificialisation des terres, ou des poumons verts, zones de protection de la biodiversité, qui évitent justement l’imperméabilisation, donc l’artificialisation ?
Le texte original prévoit aussi la possibilité de compenser des surfaces artificialisées, par d’autres que l’on replanterait (c’est la notion de zéro « net »). En d’autres termes, on pourrait reboiser une friche industrielle en replacement de l’artificialisation d’une zone humide à haute valeur environnementale et de biodiversité, ce qui n’a vraiment aucun sens sauf celui de se donner bonne conscience !
L’exécutif ayant convenu que le dispositif adopté à la fin de la précédente législature était imparfait (1) difficilement applicable et nécessitait d’être amendé, les élus, principalement ceux liés aux territoires et donc à la réalité, se sont évidemment emparés du débat pour pointer cette incohérence, et y proposer des correctifs.
D’un côté, l’association des maires de France (qui a déposé de nombreux recours devant le Conseil d’Etat au sujet de ce texte) a publié à cet effet un ensemble de 20 propositions, parmi lesquelles les 3, 4, 5 et 17 (2) vont dans le sens d’une prise en compte des spécificités des terrains et parcours de golf.
D’un autre côté, le Sénat a déposé le 14 Décembre dernier sa proposition de loi visant à « faciliter la mise en oeuvre du ZAN, en proposant en particulier que les surfaces végétalisées à usage résidentiel, secondaire ou tertiaire (jardins particuliers, parcs, pelouses…) soient considérées comme non artificialisées, une petite fenêtre qui pourrait permettre de reclasser les terrains de golf et les considérer alors comme des parcs, non artificialisés.
Dernièrement, les deux premiers décrets du conseil d’État ont été publiés en Avril 2022. Ils, précisent encore trop peu le statut des terrains de golf, mais laissent penser qu’ils pourraient être considérés en catégorie « 8 », (surfaces naturelles ou végétalisées constituant un habitat naturel, qui n’entrent pas dans les catégories 5°, 6° et 7°).
Finalement quelles sont les fonctions écologiques des sols ?
Le sol est la couche superficielle de l’écorce terrestre composée d’éléments minéraux d’origine géologique et d’éléments organiques issus de l’action des organismes vivants sur l’eau et l’air dont il régit les cycles. Une partie importante de cette fonction est réalisée par les milliards d’organismes vivants microscopiques (bactéries, champignons, algues) ou macroscopiques (vers, insectes) que le sol héberge en symbiose dans chaque mètre cube *. Les définitions internationales convergent toutes vers les fonctions suivantes pour les sols :
- fonction d’habitat (organismes, biodiversité)
- Fonction régulatrice (rétention, circulation, infiltration de l’eau, dégradation des polluants, régulations des nutriments)
- Contrôle de la composition chimique de l’atmosphère et contribution aux processus climatiques
- Fonction productrice (production, recyclage et régulation de biomasse)
- Fonction de support
- Source de matière première
Si les quatre premières fonctions sont naturelles (filtration, purification, stockage et transformation des substances), les deux dernières sont plutôt anthropiques (liées à l’activité humaine). Et toutes ces fonctions sont considérablement multipliées sur les réservoirs verts et de biodiversité que représentent les parcours de golf.
* On devrait même parler de volume (m3) plutôt que de surface (m2) d’artificialisation les fonctions des sols étant mises en oeuvre par percolation.
Il appartient donc aux golfs, via leurs structures fédératives, les collectivités territoriales où il sont installés ou leurs représentants d’intérêts de se saisir de ces petites ouvertures pour faire valoir la spécificité des surfaces vertes qu’ils entretiennent et valorisent, en ce qui concerne plus particulièrement la préservation de la capacité de draînage de leur perméabilité.
La fenêtre mérite même d’être élargie aux importantes réflexions menées par la filière pour réduire fortement l’utilisation des produits phytosanitaires, tout en aménageant des infrastructures qui permettent le stockage des ruissellements pour l’arrosage des terrains en remplacement des eaux potabilisées.
Comme souvent, ça n’est pas le savoir-faire qui manque, mais le faire-savoir !
(1) communiqué de presse de l’AMF
(2) synthèse des propositions de l’AMF dans le cadre de la lutte contre l’artificialisation des sols